Les chercheurs de l’UMons ont listé les abeilles sauvages de Belgique et ont classé dans 3 des catégories de l’IUCN (L’Union internationale pour la conservation de la nature) celles qui sont les plus menacées : vulnérables (VU), en danger (EN) et en danger critique d‘extinction (CR).
Résultats : 32,8 % des abeilles sont menacées en Belgique.
Le déclin de la biodiversité en Belgique
On assiste à un déclin général de la biodiversité en Belgique. Le pourcentage d‘espèces d‘abeilles menacées en Belgique est comparable à celui d‘autres groupes :
• Coléoptères (24,3 %),
• Mammifères (28,4 %),
• Oiseaux nicheurs (29,9 %),
• Araignées (33,8 %),
• Libellules (30,6 %).
D’autres taxons peuvent quant à eux être considérés très menacés :
• Papillons (50 %),
• Amphibiens (43,8 %),
• Fourmis (52,9 %),
• Reptiles (57,1 %).
Les plantes vasculaires (plantes à tige, feuilles et racines dans lesquelles l‘eau puisée dans les racines circule dans la plante) sont menacées à 27,6 % en Belgique, avec une proportion plus élevée en Wallonie (31,9 %) qu‘en Flandre (18,7 %). La destruction et l‘eutrophisation des habitats peuvent contribuer à expliquer ce déclin.
Face à cette situation préoccupante, une stratégie nationale belge pour la biodiversité sera mise en place cette année. Elle rassemble les objectifs et les actions des différentes stratégies existantes développées à tous les niveaux de gouvernance et intègre les cibles de la stratégie européenne pour la biodiversité. Ce document, non encore rendu public, sera applicable aux niveaux fédéral et régional. Des actions de conservation pourront cibler spécifiquement les espèces d‘abeilles menacées en agissant sur une extension des zones de protection concernées. Les aires protégées (réserves naturelles nationales, réserves naturelles certifiées, zones humides d‘intérêt biologique, réserves forestières) couvrent une superficie de 0,9 % en Wallonie (15 600 ha) et de 3 % en Flandre (40.000 ha). Les chercheurs conseillent de préserver les milieux particulièrement riches en espèces comme les landes, prairies calcaires et dunes côtières.
Des recommandations
Les résultats du projet fédéral belge BELBEES (https://cutt.ly/8rPvzhP) montrent clairement l’impact des pratiques humaines actuelles sur les abeilles sauvages en Belgique : la perte d‘habitat, les pesticides, l‘épuisement des ressources alimentaires et le changement climatique. Afin de réduire cet impact négatif, les scientifiques préconisent des ajustements et des progrès incluant des techniques de production agricole et de gestion du territoire plus vertueuses. Ils préconisent également un maintien des inventaires d’abeilles sauvages pour combler certains manques de connais sances. Ils ont également formulé des recommandations pour répondre à des dangers spécifiques. Citons ces recommandations qui rencontrent dans bien des cas les intérêts des apiculteurs :
1. L’appauvrissement des ressources florales
• Restaurer des habitats (semi-)naturels et d‘éléments paysagers à petite échelle ;
• Promouvoir les meilleures plantes-ressources pour les abeilles sauvages dans les zones (sub)urbaines ;
• Améliorer la disponibilité des plantes à fleurs qui bénéficient à certaines espèces d‘abeilles cibles en déclin, rares ou importantes sur le plan écologique ;
• Promouvoir les bonnes pratiques de gestion des plantes à fleurs dans tous les types de zones ;
• Revoir la loi concernant l’échardonnage.
2. La fragmentation de l’habitat
• Protéger et restaurer les habitats (semi)naturels des abeilles sauvages ;
• Accroître l‘adéquation des zones urbaines et agricoles pour les abeilles sauvages : préserver les haies, les
micro-reliefs, etc. ; gérer les pesti cides, le calendrier de tonte et d‘éla gage, etc. ; en zone urbaine, gestion différenciée et plantations mellifères ; adopter des techniques agricoles comme l’agro-écologie, l’agriculture de précision, les cultures fleuries (légu mineuses), la rotation des cultures, les bandes fleuries) ;
• Avoir une approche dynamique de conservation pour les abeilles sauvages en prévoyant les futures zones de protection et en planifiant de futurs lieux de dispersion (conservatoires).
3. L’émergence de maladies
• Étudier la pathogénicité des parasites et virus des abeilles sauvages chez les bourdons, les osmies et les autres abeilles sauvages ;
• Évaluer l‘effet des pratiques de ges tion sur la prévalence des maladies dans les populations d‘abeilles sau vages pour palier au manque d’infor mations : effet de la proximité des ruches, des hôtels à insectes, etc. ;
• Mettre en œuvre l‘observation et le suivi du commerce des pollinisateurs en Belgique incluant Apis mellifera, Bombus terrestris, Bombus sp., Osmia spp. (Osmia cornuta, Osmia bicornisi) et Mechachile rotundata. Surveiller M. sculpturalis, espèce considérée invasive et potentiellement porteuse de nouveaux agents pathogènes pour les espèces indigènes.
4. Les pesticides et engrais
• Etudes exploratoires des effets létaux, sublétaux et chroniques des pesticides sur les bourdons et autres abeilles sauvages ;
• Etudes complémentaires pour une meilleure connaissance de l’impact des intrants agricoles sur les abeilles sau vages (eutrophisation des milieux) ;
• Développer des biomarqueurs pour mesurer les effets des pesticides sur les abeilles sauvages ;
• Poursuivre les pistes exploratoires pour utiliser les abeilles sauvages dans le cadre de suivis environnementaux ;
• Promouvoir les bonnes pratiques sani taires et adapter le cadre réglemen taire pour l‘utilisation des pesticides ;
• Promouvoir des alternatives aux pesticides ;
• Étudier l‘impact des apports de nitrates d’origine agricole.
5. Le changement climatique
• Étudier les effets du changement climatique sur les abeilles sauvages ; • Réduire les causes de déclin (épuise ment des ressources florales, régression de l‘habitat, les pesticides, maladies, etc.) pour renforcer les espèces dans le contexte global du changement climatique.
6. Sensibilisation et promotion des bonnes pratiques
• Sensibiliser le grand public ;
• Promouvoir la biodiversité et les abeilles sauvages dans les programmes scolaires ;
• Promouvoir les bonnes pratiques dans différents contextes ;
• Soutenir le développement et la mise en œuvre d‘un indicateur « pollinisateurs » pour un suivi de pollinisateurs.
7. Programme de surveillance
• Organiser la collecte, la numérisation et la diffusion des données sur les abeilles sauvages ;
• Assurer la pérennité des bases de données sur les abeilles sauvages en Belgique ;
• Améliorer la valorisation des données (open data) ;
• Développer un programme de surveil lance des abeilles (régional ou national).
Le document est disponible dans son intégralité sur le site du projet SAPOLL, « Plan d’action transfrontalier pour les pollinisateurs sauvages » : https://cutt.ly/2r0rjuP