C’est le travail de plusieurs équipes qui nous permet aujourd’hui de publier ces résultats. Ellen Danneels du HoneyBee Valley s’est chargée de la mise en place du questionnaire et de son envoi en Flandre. Etienne Bruneau a retravaillé sa traduction et s’est chargé de l’envoi en Wallonie et à Bruxelles avec l’aide d’Eliane Keppens de la FAB. C’est enfin Gilles San Martin du CRA-W qui a réalisé l’important travail d’analyse statistique des données recueillies, ce qui vous permet d’avoir accès aux informations présentées dans cet article.
Mortalité des colonies
Comme pour l’enquête Coloss de l’an dernier, deux approches ont été utilisées pour estimer les taux de mortalité hivernale et leur intervalle de confiance à 95 % (IC) :
- 1. Les « mortalités observées » avec un modèle de régression linéaire GLM1 donne des résultats qui reviennent à ce qu’on obtiendrait en divisant le nombre total de colonies perdues pendant l’hiver dans une région par le nombre total de colonies avant l’hiver dans cette région. L’approche GLM est simple mais ne tient pas compte de la qualité des données. Si vous n’avez dans votre base de données qu’un seul rucher dans une région, ce modèle fournira l’estimation de la mortalité pour toute la région.
- 2. Les « mortalités estimées » avec modèle binomial à effets mixtes BLUPs2 permet d’obtenir les meilleurs prédicateurs pour chaque région. Avec l’approche des modèles BLUPs, la valeur de la mortalité pour chaque région est ramenée vers la moyenne (mortalité moyenne en Belgique). Plus les données sont de faible qualité dans une région (forte variabilité ou peu de réplicas) et plus les valeurs seront tirées vers la moyenne. Le contraste entre les régions est donc plus faible avec cette approche.
Les résultats des mortalités « estimées » et « observées » sont dès lors différents au niveau des différentes provinces comme vous pouvez le constater dans le tableau 1.
La figure 1 présente les résultats des mortalités estimées par province (A) et par région agricole (B).
Par province et région, c’est la Région de Bruxelles capitale qui présente le plus de problèmes (22 % IC 16,1 à 29,4 %) suivie par le Hainaut (21,8 IC 15,2 à 30,3). On peut remarquer que le nombre d’observations est cependant limité ce qui limite la validité des projections statistiques.
Sur base du tableau de la zone agricole, hormis le fait que les mortalités sont plus faibles en Campine (10,6 % Intervalle de Confiance : 9,4 à 12,1 %) et en Lorraine (10,9 % IC 8,3 à 14,2 %), il est beaucoup plus difficile de différencier les autres régions. Côté Région wallonne, c’est le Condroz qui semble le plus touché avec 21,9≈% (IC 18,8 à 25,3 %) de mortalité estimée.
Afin de bien faire ressortir les différences de mortalités entre les différentes localités où sont situés les ruchers suivis, nous avons choisi parmi les différentes cartes produites, de vous présenter la carte sur laquelle les communes sont regroupées par décile en fonction de la mortalité des ruchers qui s’y situent. Chacun des déciles colorés de bleu foncé à rouge sombre regroupe 10 % des ruchers et les limites de mortalité dans chacun des groupes sont reprises sur la légende de la carte (fig. 2).
Pour cet hiver 2020 - 2021, on peut voir se dessiner certaines poches de forte mortalité au centre et au nord de la province de Namur, dans la botte de Chimay, Couvin, à l’ouest de la province de Luxembourg, au nord d’Anvers. La densité de ruchers observés reste cependant faible dans ces zones (fig. 3).
Suivi de la varroase
Le varroa reste toujours l’agent pathogène le plus impactant dans les ruchers et il est intéressant de voir ce que les apiculteurs ont mis en œuvre pour pouvoir lutter contre ce parasite. Le tableau 2, avec les périodes de traitement, reprend la liste des produits utilisés ainsi que leur nombre d’utilisateurs par mois. Les périodes privilégiées par les apiculteurs sont mises en jaune avec le pic en jaune plus marqué. En fonction du mois, la technique ou le produit le plus utilisé est mis en gras.
Les méthodes biotechniques sont utilisées très largement avec les retraits de couvain de mâles principalement en mai avec généralement 2 à 3 retraits. La création de ruchettes en mai suit et est deux fois moins pratiquée. L’usage de l’hyperthermie reste anecdotique. Dans les traitements considérés comme « doux », avec les acides ou les huiles essentielles, c’est l’acide oxalique principalement sous forme de dégouttement et en traitement d’hiver qui occupe la première place. En saison apicole, plus particulièrement en août, cet acide est concurrencé par l’acide formique, les huiles essentielles et le BeeVital HiveClean. Tous ces produits sont principalement utilisés une fois en saison hormis le BeeVital HiveClean, pour lequel au moins une triple application est recommandée sur la notice d’application.
A partir du mois d’août, ce sont les produits de synthèse qui commencent à être utilisés avec, en tête, l’amitraz principalement sous forme de rubans. Les traitements à l’amitraz peuvent couvrir deux à trois mois comme le montre le tableau 3 sur la répétition des traitements. On constate que le coumaphos n’est pratiquement plus utilisé.
Le tableau 3, indique le nombre d’applications de chaque traitement ou technique. Toutes les utilisations par plus de 50 apiculteurs sont reprises en jaune.
Le plus souvent les traitements biotechniques sont combinés aux traitements doux (40,4 % des apiculteurs) (tableau 4). On constate également que 7,9 % des apiculteurs ne réalisent aucun traitement.
Un modèle prédictif mis en place sur base de plus de 500 données prévoit une mortalité de 28,4 % des colonies non traitées. 4 % des apiculteurs n’utilisent que des bandes chargées en produits chimiques et le modèle prédit pour les colonies traitées de cette façon, des mortalités de 8,8 % ce qui représente une chute très significative de 19,6 %. Les résultats du modèle sont beaucoup plus variables pour les traitements « doux » allant de non significatif à dans le meilleur des cas, une réduction de 15,5 % mais plutôt de l’ordre de quelques %. C’est la sublimation qui semble donner les meilleurs effets pour l’acide oxalique.
Toutes ces informations n’auraient pas été possibles sans votre participation active à ce questionnaire et nous vous engageons à participer l’an prochain à sa nouvelle édition. Merci !
Références :
- 1. Modèle GLM – generalized linear model : type de régression linéaire
- 2. Modèle BLUPs - Best Linear Unbiased Predictors qui permet une estimation des effet alléatoires.