FICHE PEDAGOGIQUE : Propolis, protection du nid et santé des colonies

Agnès FAYET

La propolis est un terme apicole qui désigne les résines végétales collectées et travaillées par les abeilles pour être utilisées dans la ruche. La propolis est un élément en lien avec l’aménagement du nid et avec le développement d’une immunité sociale de la colonie. Elle lui confère un certain nombre d’avantages physiologiques positifs. Parois recouvertes de propolis, ouvertures bouchées, intrus soigneusement « momifiés »… La propolis, élément prélevé à l’extérieur de la ruche, entre véritablement dans la stratégie collective de défense du nid.

L’utilisation dans la ruche

La propolis a plusieurs usages dans la ruche. Les abeilles s’en servent pour étanchéiser les parois du nid, ce qui prévient l’installation de champignons sur les parois de la ruche. N’oublions pas que ce comportement trouve son origine dans l’aménagement de cavités arboricoles. Les abeilles propolisent également les fissures et réduisent les entrées de la ruche. La propolis a également un rôle à jouer dans le maintien d’une humidité relative stable et dans la réduction des charges microbiennes à l’intérieur de la ruche. Enfin, ayons conscience que les ouvrières travaillent les alvéoles de cire en y ajoutant de la propolis. Les chercheurs ont déterminé six facteurs influençant la production de propolis dans la colonie : l’origine botanique de la résine, la génétique des abeilles mellifères, la structure de la ruche, la disponibilité de la nourriture, les facteurs environnementaux et les maladies. Ces différents facteurs s’entrecroisent et sont l’objet du questionnement des apidologues.

Une immunité sociale

Confrontées à des menaces provenant d’agents pathogènes, de parasites, de pesticides ainsi qu’à une nutrition déséquilibrée, les abeilles développent des réponses immunitaires naturelles (immunité individuelle) et des défenses comportementales collectives (immunité sociale) destinées à améliorer leur santé et leur productivité. L’immunité sociale explique comment les comportements individuels des membres du groupe réduisent efficacement la transmission des maladies et des parasites au niveau de la colonie. C’est un domaine émergent en biologie sociale des insectes. Une forme d’immunité sociale dans les colonies d’abeilles mellifères est la collecte de résines végétales antimicrobiennes et leur utilisation dans l’architecture du nid en tant que propolis. Cette pratique diminue le risque d’exposition aux pathogènes et de transmission des maladies au sein du groupe. Elle complète et renforce le système immunitaire individuel, bénéficiant de ce fait à la santé de toute la colonie. Nous avons ainsi un cercle sanitaire vertueux.

L’enveloppe de propolis peut agir directement sur le système immunitaire des individus, réduisant ainsi le besoin d’activer la production de réponses immunitaires humorales, physiologiquement coûteuse. Les colonies avec une enveloppe naturelle de propolis sont plus fortes et on note des niveaux de vitellogénine plus élevés après l’hivernage, bien que l’activité biologique de la propolis ait diminué au cours de l’hiver. Une enveloppe de propolis naturelle agit comme une couche antimicrobienne enveloppant positivement la colonie pour le bénéfice de l’immunité individuelle et collective.

Un potentiel thérapeutique pour la colonie

Les avantages sanitaires que les abeilles tirent des résines sont principalement dus à leurs propriétés antimicrobiennes dont le potentiel thérapeutique est aujourd’hui mieux connu. In vitro, les propolis inhibent ainsi la croissance de la bactérie pathogène Paenibacillus larvae, responsable de la loque américaine. La propolis agit aussi positivement contre Ascosphaera apis, responsable de l’ascosphérose, mycose du couvain. Il existe également des preuves que la propolis a la faculté de réduire les impacts des mycotoxines produites par les champignons. La propolis réduit ainsi les effets néfastes de l’exposition aux toxines produites par Aspergillus, qui provoque l’aspergillose, la maladie fongique du couvain pétrifié.

Les chercheurs étudient le potentiel actif de la propolis pour lutter contre d’autres agents pathogènes, parasites et ravageurs comme les virus, Nosema, Varroa destructor et le petit coléoptère des ruches. On ne peut pas encore en affirmer catégoriquement les effets. On sait simplement que la propolis provenant de colonies capables de maintenir des niveaux d’infestation de varroas très faibles sans traitement aux acaricides est distincte dans sa composition chimique de la propolis provenant de colonies avec un niveau élevé d’acariens. Toutes ces pistes de recherche sont encore en cours.

Aujourd’hui, il est possible de dire que l’exposition des abeilles à la propolis peut « amorcer » le système immunitaire de la même manière qu’il semble activer les voies de détoxification. On lui attribue également une augmentation de la longévité des abeilles via des voies impliquant des antioxydants. Ces résultats positifs sont importants même s’il faut garder à l’esprit que la propolis peut être une source de contamination par les pesticides. Autre point à garder en vue, le niveau d’activité dépend de l’emplacement des colonies, probablement explicable par la différence dans les sources végétales récoltées. On émet l’hypothèse que les écosystèmes humides-tropicaux pourraient abriter des plantes avec des niveaux généralement plus élevés d’antimicrobiens.

Parois rainurées - Copie d'écran de Hodges et al. (2019)
Parois rainurées - Copie d’écran de Hodges et al. (2019)

Parois grattées - Copie d'écran de Hodges et al. (2019)
Parois grattées - Copie d’écran de Hodges et al. (2019)

Favoriser l’usage de la propolis dans les colonies

Les apiculteurs peuvent agir positivement en suscitant l’utilisation de la propolis dans des colonies standard. C’est un moyen d’améliorer et de maintenir la santé et la résilience de leurs colonies. Certaines méthodes sont appliquées dans ce but. Les apiculteurs peuvent réaliser des rainures artificiellement à l’intérieur de la ruche à l’aide d’une scie. Pour cette texture artificielle, on peut produire des rainures parallèles tous les 7 cm par exemple. Comptez 0,3 cm de profondeur pour chaque rainure.

Il est aussi possible de gratter les parois intérieures des ruches en bois à l’aide d’un outil comme une brosse métallique.

Enfin, il est également possible d’agrafer des grilles à propolis sur une ou plusieurs parois intérieures de la ruche.

Les trois méthodes augmentent sensiblement l’entrée de la résine dans la ruche. L’efficacité relevée la plus importante provient de l’utilisation des grilles à propolis sur les parois.

Aujourd’hui, on prend conscience que les ressources environnementales nécessaires à l’équilibre des colonies d’abeilles ne se résument pas à l’offre pollinifère et nectarifère. L’accès aux ressources « non orales » en provenance des arbres et des haies n’est pas négligeable et devrait être intégré dans les programmes de conservation et de restauration des écosystèmes afin de mieux soutenir la santé des abeilles.

Parois munies de grille - Copie d'écran de Holges et al. (2019)
Parois munies de grille - Copie d’écran de Holges et al. (2019)

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  • Mots clés : fiche, protection, défense, immunité, nid, santé, propolis
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