Le pollen est constitué de minuscules grains produits par les organes mâles des fleurs des végétaux (anthères). Les grains de pollens produits par une fleur sont alors transportés par divers moyens (vent, eau, insectes, etc...) vers les structures femelles d’une autre fleur dans le but d’assurer sa fécondation, elle-même menant à la production de fruits puis de graines indispensables pour la pérennité de l’espèce végétale impliquée.
Pourquoi du pollen dans le miel ?
Plusieurs facteurs expliquent la présence de pollen dans le miel.
1. Quand l’abeille butine pour prélever le nectar d’une fleur, elle pourra être amenée à répandre du pollen dans le nectar produit par les nectaires s’ils sont situés à proximité des anthères produisant le pollen. Ainsi, l’abeille dans sa recherche de nectar agite les anthères et fait tomber du pollen de la fleur butinée dans le nectar qui sera ramené dans la ruche en vue de produire du miel. Cela se produit régulièrement sur des fleurs assez ouvertes telles que les brassicacées (ex. : colza) et les rosacées (ex. : fruitiers). Dans ce cas, la présence de pollens dans le miel suppose donc que les fleurs de ces végétaux ont été butinées pour récolter le nectar ayant servi à la production du dit miel.
Dans certains cas, la morphologie des fleurs mâles de châtaignier ou des fleurs de myosotis pour lesquelles les nectaires sont situés à proximité immédiate des anthères favorise la présence naturelle d’un très grand nombre de grains de pollen dans le nectar récolté par l’abeille mais cette présence abondante de pollen ne signifie pas pour autant que le miel est majoritairement constitué du nectar de ces plantes. A l’opposé, les lamiacées ont généralement des nectaires très protégés pour y maintenir l’humidité du nectar. La distance avec les anthères est dans ce cas très grande. Cela se traduit au niveau de l’analyse pollinique par une densité faible de pollen dans le miel pour ces espèces alors que les brassicacées et rosacées présentent généralement une densité pollinique moyenne et le châtaignier ou le myosotis une densité pollinique forte.
2. L’abeille peut également produire du miel à partir de miellat (substance excrétée par certains insectes piqueurs suceurs) ou de nectar extrafloral (nectar produit par des nectaires extrafloraux, glandes en dehors des fleurs). Dans ce cas, il n’y a plus de liaison entre l’abeille et le pollen de la plante butinée pour son miellat, ce qui rend l’identification de l’origine du miel plus délicate. Néanmoins, les pollens anémophiles (dispersés par le vent sans l’intervention d’un insecte pollinisateur) pourront se coller sur ces excrétions et seront alors récoltés avec le miellat ou le nectar extrafloral. Les pollens anémophiles sont produits en masse par des végétaux qui ne sont pas butinés par les insectes pollinisateurs à la recherche de sucre pour la production de miel (à quelques exceptions près comme le châtaignier). La présence de pollens anémophiles dans le miel est donc un indicateur de miellat ou de nectar axtrafloral ayant servi à l’élaboration du miel au même titre que la conductivité du miel ou encore la présence de sucres supérieurs (trisaccharides).
Analyse des grains de pollen présents dans le miel : la mélissopalynologie
Les grains de pollens produits par une espèce végétale, et qu’on peut donc retrouver dans le miel via les processus cités dans le paragraphe précédent, présentent des caractéristiques plus ou moins variables selon l’espèce qui les a produit. Ainsi, les végétaux appartenant à la famille des asteracées tendent à produire des grains de pollens échinulés alors que certains végétaux appartenant à la famille des fabacées produisent des grains de pollens circulaires sans fioritures. Mais la nature reste extraordinairement complexe de sorte qu’il n’existe pas de règle générale stricte : au sein de chaque famille, chaque espèce végétale produit des grains de pollens de taille et de morphologie bien définies. Les critères morphologiques des grains de pollens sont donc subtilement différents d’une espèce à l’autre et ces différences sont souvent invisibles pour un oeil non-expérimenté...
L’étude de ces caractéristiques trouve son application en mélissopalynologie pour identifier l’origine florale ou origine botanique du miel produit par les abeilles, c’est-à-dire déterminer les essences florales que les abeilles ont butiné pour élaborer le miel soumis à l’analyse. L’étude du pollen peut être également utile dans le cadre d’enquêtes écotoxicologiques réalisées pour trouver la cause des mortalités massives d’abeilles. Comme le pollen constitue la source principale de protéine des insectes butineurs, la palynologie permet également d’étudier la biodiversité dans la zone de butinage visitée par les abeilles. Avec cette information, il est possible d’identifier des zones géographiques propices pour l’apiculture.
Méthodes d’analyse pollinique réalisées au laboratoire du CARI
Le laboratoire du CARI réalise l’analyse pollinique selon la méthode sans acétolyse ou la méthode avec acétolyse selon Erdtman, soient deux méthodes officiellement reconnues par l’International Commission for Bee Botany of IUBS ainsi que dans le célèbre Apidologie 35 (2004) S18–S25.
L’analyse pollinique consiste à déposer une solution homogène de miel soumis à l’analyse (préparé selon la méthode acétolysée ou non acétolysée) sur une lame de microscope afin de compter et d’identifier les grains de pollen présents dans le miel. L’identification des différents types de grains de pollen (produits par différentes espèces végétales) est un savoir-faire complexe, qui exige beaucoup de pratique et d’expérience. Depuis plus de 30 ans, le CARI a donc développé une expertise en la matière et a établi une collection de lames de références, sorte de bibliothèque qui permet d’identifier les pollens présents dans un miel afin de préciser ou vérifier l’origine florale du miel analysé.
L’analyse pollinique, oui mais pas que...
Pour déterminer l’origine florale d’un miel, l’analyse pollinique seule est rarement suffisante : rien dans la nature n’est fixé et ce n’est pas parce qu’on trouve une proportion de pollens d’une plante dans un miel que le nectar de cette plante a permis la production de miel. Alors comment savoir quel nectar ou quel miellat produit par quelle plante à servi à l’élaboration du miel ?
La détermination de l’appellation botanique d’un miel (monofloral ou toutes fleurs) dépend donc de l’interprétation des résultats de plusieurs analysées combinées à savoir : les analyses physico-chimiques, l’analyse pollinique et l’analyse organoleptique. Ensemble, ces résultats permettent de vérifier et de préciser l’origine florale d’un miel. Voilà là toute l’importance de réaliser une analyse complète d’un miel.