Ses premiers contacts avec les abeilles datent de 1962. Parti du Kiwu pour fuir les troubles politiques au moment de l’indépendance du Congo belge, cet ingénieur agronome tropical de formation va tenter sa chance au Maroc où le destin le place pour la première fois sur le chemin des colonies d’abeilles. À Sidi Yahya du Gharb, dans le Nord du Maroc, il est employé par Paul Haccourt, un belge bien connu, propriétaire des Établissements apicoles marocains, une entreprise de belle ampleur qui sera ensuite rachetée par le Roi du Maroc Hassan II. C’est dans ce cadre qu’il apprend l’apiculture, sur le tas : une apiculture professionnelle à grande échelle, faite de transhumances dans les plantations d’eucalyptus, dans les vergers d’orangers ou sur le lavandin en montagne. Chaque rucher d’une vingtaine de colonies était sous la responsabilité de gardiens qui vivaient souvent sous tente à côté des ruches. C’est ainsi qu’il est piqué par l’apiculture, dans tous les sens du terme. Le contact avec l’abeille Tellienne (Apis mellifica intermissa), sous-espèce noire d’abeilles maghrébines, n’était pas toujours pacifique ! Il côtoie dans ce cadre un vieux russe blanc passionné par la sélection de l’abeille saharienne (Apis mellifera sahariensis), une abeille blonde, très travailleuse, très douce, dont Frère Adam a intégré certains gènes dans sa sélection de l’abeille Buckfast. Le jeune Claude était chargé de poster les reines qui partaient aux quatre coins du monde, jusqu’en Australie. L’aventure marocaine aurait bien pu durer toute la vie… mais il était bien difficile d’envisager un futur professionnel aussi précaire. Voilà Claude parti pour 1 an de maraîchage à Tenerife, puis 9 années au Sénégal à faire de la vulgarisation de cultures vivrières et coton, puis 7 ans encore en Sardaigne dans la gestion hôtelière. Les abeilles ont suivi Claude… dans un rêve. Pour retrouver leur contact direct, il faut attendre 1986 où, revenu en Belgique, Claude rencontre M. Van Meerbeeck, Président de la SRABE*… Et l’aventure apicole reprend alors qu’il enseigne désormais l’horticulture. Il suit les cours de la SRABE à l’époque où les cours pratiques étaient encore donnés au pied du Museum d’histoire naturelle, dans le Parc Léopold. Il se retrouve petit à petit de l’autre côté de la barrière à donner des cours à des générations d’apiculteurs parmi lesquels Yves Roberti, l’actuel président de l’association bruxelloise. D’une manière savoureuse, Claude passera les 8 dernières années de sa carrière comme professeur détaché aux ateliers nature du Museum d’Histoire naturelle. Il est aujourd’hui encore bien connu des apiculteurs bruxellois, toujours enseignant et responsable des examens, bien engagé aussi dans le comité de rédaction de la revue « Le Rucher fleuri » où il propose des articles culturels. Il a un peu (mais pas entièrement) essaimé dans le Hainaut où il réside, dans la toute petite section de l’Abeille de la Haute Sambre, un peu loin de son rucher resté bruxellois. Et qui sait ce que les abeilles et le destin lui réservent encore ?
La salle des légendes
La parole est de miel
Un essaim d‘abeilles blanches serait venu se poser sur la bouche de Ste Rita bébé, déposant du miel dans sa bouche. La sainte est parfois représentée entourée d’abeilles. La Légende dorée de St Ambroise raconte une aventure très similaire où la bouche de St Ambroise bébé aurait abrité des abeilles le temps d’une nuit. Les abeilles symbolisent l’éloquence, la parole et l’intelligence : la bonne parole, parole de miel (melliglossos en grec) comme celle de St Bernard de Clairvaux, lui aussi représenté en compagnie d’abeilles, « Doctor mellitus fluus » de l’Église, dont les disciples ont « essaimé » la parole évangélique dans toute l’Europe.
La bougonie :
mythe et multiplication des colonies
« Les guêpes naissent du cheval et les abeilles du bœuf » écrivait l’antique Varron (XVI, 4). La mythologie a inventé une méthode de multiplication des colonies basée sur le sacrifice d’un animal. Elle porte le nom de « bougonie ». La méthode est pratiquée par Aristée lorsque le berger, victime d’un des premiers dépérissements de l’histoire humaine, retrouve des abeilles dans les cadavres des taureaux qu’il sacrifie. Quant à Samson, il trouve des abeilles et du miel dans le cadavre d’un lion tué de ses mains. Une bien cruelle méthode que la bougonie, dont l’apiculture se passe hors-les-mythes.
La quête de symboles
L’abeille est à elle seule une telle réserve de symboles qu’il n’est pas étonnant de la retrouver à tous les coins de rue. À Bruxelles, au cœur du Pentagone, l’abeille est littéralement omniprésente, symbolisant tantôt l’immortalité, tantôt le pouvoir, tantôt la richesse qui fructifie, tantôt encore le travail au sein de la loge maçonnique… Des Galeries royales Saint-Hubert à la Grand Place, du Mont des Arts au Palais des Académies, de la Bourse aux Sablons, la ruche est partout. À vous de la trouver…
