!!!Introduction
Visiter une colonie d’abeilles domestiques. L’idée ne vous est-elle jamais venue ? La peur vous fait peut-être reculer. Si vous être proche de la nature, c’est pourtant une expérience inoubliable. Dès les premiers instants, on est totalement pris par le spectacle incessant des abeilles qui vaquent à leurs occupations. C’est unique, il faut le vivre au moins une fois dans sa vie. Vous en ressortirez peut-être piqué, mais par le virus de l’apiculture.
Si vous connaissez l’un des quatre mille apiculteurs wallons, n’hésitez pas à lui demander de vous emmener un jour dans son rucher. La plupart des apiculteurs sont très heureux de pouvoir communiquer leur passion à d’autres personnes. Si vous n’en connaissez pas, nous nous ferons un plaisir de vous donner l’adresse d’un apiculteur prêt à vous recevoir. Le jour venu, n’hésitez pas à bien vous protéger (surtout le visage), on est beaucoup plus à l’aise lorsqu’on est certain que l’on ne se fera pas piquer.
!!!La visite
Au moment de la visite, tous vos sens sont en éveil. Un petit coup de fumée et c’est parti. Il faut une parfaite maîtrise de soi pour ne pas réagir lorsqu’en quelques secondes, vous vous retrouvez au centre d’un petit nuage d’abeilles qui bourdonnent autour de vous. Encore un peu de fumée et tout rentre vite dans l’ordre. La première peur passée, on peut se concentrer sur les manipulations réalisées par l’apiculteur qui "ouvre" une colonie. C’est un peu comme si vous assistiez à une opération chirurgicale. Les mouvements sont lents et précis. Ici, on ouvre les entrailles de "l’individu colonie". Visiter une ruche est un travail de précision qui nécessite un grand savoir-faire et une bonne connaissance du comportement des abeilles. L’apiculteur sortira chaque cadre en prenant soin de n’écraser aucune abeille. La première fois que l’on assiste à un tel spectacle, on est frappé par le nombre impressionnant d’insectes. En saison, une colonie peut compter plus de soixante mille individus. On voit les abeilles se déplacer dans tous les sens sans très bien comprendre ce qu’elles font. Les abeilles marchent sur des gâteaux composés d’alvéoles de cire aux formes régulières et hexagonales. Elles sont remplies tantôt de miel brillant dans le fond des cellules, tantôt de poudre colorée, le pollen. Vers le centre des rayons, on peut voir de petits asticots qui baignent dans une gelée blanche. Ce sont des larves d’abeilles plongées dans de la gelée royale. D’autres larves sont déjà beaucoup plus grosses et occupent l’entièreté de la cellule. Certaines cellules sont fermées (operculées) : des nymphes (dernier stade avant l’état adulte) occupent ces cellules. Il est d’ailleurs assez fréquent d’assister à une naissance d’abeille. La jeune abeille découpe le couvercle de sa cellule pour aller rejoindre ses congénères. Si je ne parle pas des oeufs, c’est qu’ils sont très petits et difficiles à voir. Avec une bonne vue, on constate que ce sont de petits bâtonnets blanc translucide piqués dans le fond des cellules. En calotte des oeufs, larves et nymphes (ensemble que l’on appelle couvain), vous trouverez d’autres cellules operculées contenant du miel. Pendant la bonne saison, les abeilles stockent et operculent le miel dans l’élément du haut de la ruche (hausse). Dès que la hausse est remplie, l’apiculteur la ramène à son domicile pour en extraire le miel.
!!!Les individus
Lorsque vous visitez une colonie entre le mois d’avril et le mois d’août, la présence d’abeilles un peu particulières attire directement votre attention. Elles sont larges et trapues avec de grands yeux qui recouvrent l’essentiel de la tête. Non, ce ne sont pas des reines. Ce sont des mâles, encore appelés faux-bourdons. Leur vol est lourd, puissant et bourdonnant. Ils sont totalement inoffensifs car ils n’ont pas de dard. À la place de ce dernier, on trouve un organe sexuel. Toute la vie du mâle n’a qu’un seul objectif : arriver à féconder une jeune reine lors de l’un de ses vols de fécondation. S’il y arrive, il en mourra. En fin de miellée d’été, les abeilles n’hésiteront pas à chasser les mâles restants vu qu’à cette période toutes les jeunes reines sont normalement fécondées.
Avec un peu de chance, l’apiculteur vous montrera la reine. Elle est souvent difficile à trouver, surtout s’il ne l’a pas marquée d’un signe coloré sur le thorax (point de couleur ou numéro). L’abdomen de la reine a seulement quelques millimètres de plus que celui d’une ouvrière. Sa couleur peut être légèrement différente. C’est cependant son comportement sur le cadre qui attire le regard. Si la visite se passe dans le calme, on peut voir la reine entourée de sa cour. Les abeilles s’empressent de la toucher soit avec leurs antennes soit avec leur langue pour prélever la phéromone royale. C’est cette substance qui va assurer la cohésion de la ruche. Elle va également inhiber le développement des ovaires des ouvrières. Ces dernières, comme la reine, sont des insectes femelles à part entière. Les oeufs qui donnent naissance aux ouvrières et aux reines sont d’ailleurs identiques. En absence d’une reine, les ouvrières peuvent pondre des oeufs. Dans une colonie normale, la reine est seule à pondre. Elle peut ainsi déposer plus de mille oeufs par jour au fond des cellules nettoyées par les jeunes abeilles. Une alimentation extrêmement riche et directement assimilable, composée exclusivement de gelée royale, lui permet de telles performances. La gelée royale est produite par des glandes situées dans la tête des ouvrières (glandes mandibulaires). Pour la produire, elles ont besoin de beaucoup de pollen.
!!!Au trou d’envol
Si l’on observe quelques instants le trou d’envol de la ruche, on y voit une grande agitation. Par beau temps, les décollages et atterrissages ne se comptent plus. Les butineuses quittent la ruche rapidement pour rentrer surchargées après un long vol (plusieurs kilomètres). Elles ont alors un vol assez lourd et semblent parfois éprouver des difficultés à se poser sur la planche d’envol de la ruche. De nombreuses butineuses rentrent avec des pelotes de pollen accrochées dans les corbeilles à pollen situées sur leurs pattes arrière. La couleur de ce pollen indique l’origine des fleurs butinées. D’autres abeilles sont simplement couvertes de pollen. Leur vol semble tout aussi lourd. Ce sont alors des butineuses de nectar ou d’eau. L’abeille dispose d’un jabot qui lui permet de transporter une quantité de liquide presque équivalente à son propre poids. L’apport de sucres permet d’assurer leurs besoins énergétiques. En période d’élevage, une quantité importante d’eau sera également nécessaire. Enfin, d’autres abeilles, beaucoup plus rares, reviennent avec de petites boules foncées et luisantes sur leur pattes arrière. C’est de la propolis. Sous ce terme un peu savant se cache le médicament de la ruche. Ce produit récolté sur les bourgeons va par exemple permettre d’éviter la prolifération de moisissures dans la colonie. La propolis servira également de mastic pour boucher tous les petits interstices auxquels l’abeille n’a pas accès.
L’apiculteur terminera la visite lorsque les abeilles commenceront à devenir plus nerveuses. À ce moment, leur comportement change, elles organisent leur défense. Il est alors temps de refermer la ruche. Tous les éléments seront remis en place pour perturber au minimum les abeilles.
Étonnant, n’est ce pas ? Une telle vie en société n’existe chez aucun autre animal. Les abeilles constituent l’un des sommets de l’évolution dans la nature. C’est peut-être pourquoi, de tout temps, l’homme s’est intéressé aux abeilles mellifères. Elles nous permettent d’entrer en contact d’une autre façon avec la nature et de bien mieux en comprendre les lois. Si vous êtes mordu, nous verrons lors d’un prochain article ce qu’il faut faire pour avoir ses propres ruches et devenir apiculteur.